LE SYMBOLE PERDU
&
LE COIN DE L´ENIGME




LE SYMBOLE PERDU ET LE COIN DE L´ENIGME - 7ième partie : 


NICOLAS POUSSIN, UN A.A. ?


SECONDE PARTIE




 




Dan Brown met en jeu dans son roman quatre Francs-maçons de grade 33, desquels seulement TROIS détiennent le Secret :
 la nature du Symbole Perdu ou Parole oubliée…
Le premier c´est Peter Salomon, Grand Maître de l´Ordre non spécifié par l´auteur ; puis entre en scène un second portant le titre d´Architecte, titre donné au responsable du Capitole et enfin le dernier, un vénérable vieillard, un homme d´église aveugle qui médite prés d´une carrière.


VII

LES ARCANA ARCANORUM : POUSSIN ET LA CAVERNE DE PLATON

TROIS ROIS OU TROIS BERGERS ?


 
Christ charge Pierre d´une mission par Raphael
Ici Jésus est montré comme le Bon Pasteur.
Remarquez qu´il manque un apôtre ! C´est Judas puisque le Christ présente les plaies.
Donc pour Raphaël au lieu de devenir un bon pêcheur,( Pêche Miraculeuse ) Pierre doit surveiller son troupeau, en bon berger…


L´un des trois détendeurs du secret chez Dan Brown est de race noire, est-ce sa façon de nous rapporter aux ROIS MAGES ?
Nous avions déjà réalisé un parallèle
entre  L´EPIPHANIE  et les  BERGERS D´ARCADIE
mais revenons un peu là dessus. .


Les trois archontes renvoient aux trois Rois Mages, mais avant eux il y eut les bergers qui rendirent hommage à la Mater.
Ce qui est logique car ils étaient plus prés d´elle, dans le sens de vivre en harmonie avec la Terre, la mère Nature.

Par contre l´épisode des Mages est rempli de symbolisme, que nous verrons plus loin.

 

Revenons aux humbles bergers devant la « crèche » celle de l´ Adoration des Bergers de Poussin ( au bas )

 La Vierge, la Mater c´est la mère nourricière, l´ancienne CERES, que nous retrouvons sur son ET IN ARCADIA EGO, tableau dédié aux bergers.


Pourquoi ce changement : des bergers pour des rois, sur sa plus fameuse toile?


Poussin surement envisagea que la royauté de son temps était occupée à bien d´autres choses que la philosophie et donc éloignée du divin.
Alors que les bergers étaient restés plus près de Dame Nature, d´ailleurs sur son tableau on aperçoit  au fond même une scène de laboure.

Comme bon disciple de Zénon, Poussin pensait qu´il fallait vivre

en accord avec la Nature et la Raison pour atteindre Sagesse et Bonheur.
C´est bien là l´atmosphère qui se dégage de son premier tableau ici-bas.

De plus l´école stoïcienne était nommée l'école du Portique  et celui-ci se répète sur les deux compositions.

Mais il y a bien plus….

Car si nous comparons ses deux Adorations, celle des Bergers et celle des Rois nous retrouvons deux facteurs communs :

- tous sont prostrés aux pieds de l´Enfant et de la Mère.
Ce qui change des autres tableaux, surtout quand il s´agit des Rois Mages,

où seul le plus âgé d´entre eux est agenouillé et non prostré tandis que le plus jeune à l´air absent.
- les habits des rois sont aussi simples, sinon plus que ceux des dits bergers.

Chez Poussin il n´y a plus d´habits richement ornés, ni de têtes couronnées.

Il n´y a que les présents pauvrement dessinés et deux couronnes déposées qui dénoncent la royauté !


Les Bergers ont l´air plus généreux, plus heureux, plus coloriés que les Rois.

La scène des rois est plus bouillante, plus belliqueuse, tant que l´homme au turban demande un peu de silence. 



 







A comparer :
En haut les Adorations par Poussin
En bas celles de Giorgione


LE SYMBOLISME DES PRESENTS

Il y a toujours une explication, essayons donc de comprendre pourquoi  Poussin ne donna pas à ses  Rois Mages un statuts plus élevé qu´aux bergers.

 Tous, riches et pauvres sommes conditionnés par la nature humaine.
La solution est donnée par le symbolisme des cadeaux royaux.

D´habitude on voit dans l'or, la reconnaissance de la royauté de Jésus, dans l'encens, celle de sa divinité et  dans la myrrhe, son humanité,
 par assimilation de ce cadeau avec celui de Nicodème lors de son embaumement.

Ceci ne fait référence qu´à Jésus.

Mais il y a une vision plus humaine, plus générale que je développais sur ma page  où l´Or était le Verbe, etc.…

Ecoutons ce que nous dit Grün Anselme dans sa « Petite méditation sur les fêtes de Noël »

L´OR

L'éclat de l'or est notre âme. Nous ne sommes pas en effet de purs et simples êtres terrestres, mais aussi des êtres célestes;
notre âme reflète l'éclat doré de la divinité, à laquelle nous avons part, notre visage est illuminé par la majesté de Dieu.

L´ENCENS

Sa fumée qui monte vers le ciel est l'image des prières que nous adressons à Dieu, du désir qui nous fait chercher un au-delà du quotidien;
 ce désir monte vers le ciel tout comme la fumée de l'encens, il en a la légèreté, rien ne peut le retenir sur la terre;
l'un et l'autre passent à travers les portes fermées, ouvrent et élargissent nos cœurs.
L'encens sent bon, son parfum remplit notre vie d'un
goût de mystère et de divinité.

LA MYRRHE


Pour les Anciens, la myrrhe est une plante du
paradis; elle évoque l'état originel auquel nous aspirons tous.
Elle te conduira vers lui, elle te permettra de te prosterner devant Celui qui te donne l'impression d'être arrivé au but,
devant qui tu peux t'oublier toi-même, cesser de tourner en rond dans ton Moi.

Notre âme a le goût du mystère divin qui lui permettra d´ atteindre le Paradis et nous libérer de la RouX ou eternel retour, symbolisé par les saisons.
C´est bien là le thème des
chrismes, des Apothéoses et le message de l´ombre qui plane sur le Tombeau d´Arcadie.


Il est donc normal de retrouver le premier dans la composition des seconds.
Mais tout être humain a-t-il une disposition naturelle vers ses mystères philosophiques ?


C´est là le sujet traité par La Caverne de Platon.
Pour bien comprendre la suite il nous faut faire un tour et non un détour dans l´antiquité ARCADIENNE, celle des philosophes.

LA CAVERNE DE PLATON ou  L´ETERNELLE LUTTE

Dieu dit que la lumière soit, et la lumière fut. Dieu vit que la lumière était bonne, et Dieu sépara la lumière d'avec les ténèbres  (Gen 1.3-4)

Lumière du monde (Jean 8.12), il est venu briller dans les ténèbres, mais, elles ne l'ont pas accueilli (Jean 1.4-5)
 Dieu est lumière, et il n'y a pas en lui de ténèbres
(1 Jean 1.5)
la lumière étant venue dans le monde, les hommes ont préféré les ténèbres à la lumière, parce que leurs œuvres étaient mauvaises
(Jean 3-19)


LUX VENIT IN MUNDUM, ET DILEXERUNT HOMINES MAGIS TENEBRAS QUAM LUCEM
Gravure de Pieter Jansz Saenredam : La Caverne de Platon
Remarquez les TROIS PHILOSOPHES qui attendent à la sortie de la caverne.

La Caverne de Platon traitée dans le Livre VII de La République, est une de ses plus célèbres allégories.
Elle met en scène des hommes enchaînés et immobilisés dans une demeure souterraine.
Tournant le dos à l'entrée de celle-ci, ils ne voient que leurs ombres et celles d'objets projetées au loin.

Ce n´est que grâce à l´aide fournie par un « homme supérieur » qu´un des habitants de la caverne pourra, après un long chemin d´ascension, échapper et sortir à la superficie. La lumière solaire l´aveugle douloureusement en un premier temps, mais la nuit venue il s´habituera progressivement à la lueur de la lune, puis à celle  de l´aurore et enfin à la diurne.

C´est alors qu´il est conscient d´avoir vécu, par la perception de reflets trompeurs, dans le mensonge toute sa vie.

Il retourne ensuite au souterrain pour  raconter son expérience aux autres. Les choses qu´ils apprécient ne sont que de sombres apparences du monde;
 la réalité les attend à l´extérieur. On le prend pour un fou, bien entendu.

Rappelons que le Fou du Tarot est l´ initié-initiateur
( voir
Poussin, le Fou )
 
Cette allégorie expose donc la pénible accession des hommes à la connaissance de la réalité, ainsi que la non moins difficile transmission de cette connaissance.
Platon met en évidence la difficulté des Hommes à changer leurs conceptions des choses, leurs résistances à le faire sous l'emprise des idées reçues.

D´ACCOUCHEMENT ILLUMINATEUR


Une clef de compréhension de l'allégorie est fournie par Platon de la bouche de Socrate: « 
[...]cette remontée depuis la grotte souterraine jusque vers le soleil ; et une fois parvenu là, cette direction du regard vers les apparences divines [...] voilà ce que toute cette entreprise des arts que nous avons exposé a le pouvoir de réaliser. » (532c) Il s'agit donc de passer de l'opinion , fournie par les sens et les préjugés, à la connaissance de la réalité intelligible, des Idées.

Le philosophe s'échappe de la caverne grâce à l'exercice de la dialectique, qui est l'art d'« accoucher les âmes » d´après Socrate.

Cette méthode consiste en un interrogatoire, mené par Socrate, souvent composé de questions fermées, auxquelles on ne peut répondre que par « oui » ou par « non », qui progresse logiquement de façon à faire « accoucher » l'interlocuteur d'une connaissance qu'il possédait en lui sans s'en rendre compte.

Ainsi sans le support d'aucune perception des sens, à mesure que son regard s'habitue à la lumière vive du monde des Idées, il parvient au terme de l'intelligible.

Cet accouchement douloureux, cette sortie de la matrice ( d´ou le titre de Matrix), de la matière à la lumière donne naissance au philosophe

Les Trois Philosophes de Giorgione
Trois Rois Mages, espérant adorer le Nouveau Né

LE PHILOSOPHE POLITIQUE

Il faut préciser qu´à l'époque de Platon, Athènes est en déclin. Le siècle de Périclès est passé et la cité voit son modèle démocratique perverti.

On peut donc lire aussi le texte de Platon comme une critique de sa propre cité, dont il stigmatise les défauts.

Platon évoque le monde illusoire dans lequel vivent les citoyens athéniens 
Cette démocratie ne le satisfait pas depuis la condamnation à mort de Socrate et la persécution de Pythagore.
Il était alors dangereux de citer le Maître de l'école pythagoricienne qui avait été décimée et dispersée.

Pourtant ici, il y a une claire référence à Pythagore, celui-ci suivit les enseignements de Phérécyde de Syros qui avaient lieu dans une caverne
[].
Pythagore aurait vécu dans une grotte, où se réunissaient vingt-huit disciples : celle de Platon évoque celle de Phérécyde et de son illustre élève.

Porphyre rappellera que pour les pythagoriciens la grotte symbolise le monde réel[].

Donc l´allégorie de la caverne serait un héritage de l'enseignement pythagoricien visant à libérer les personnes des croyances inculquées depuis des décennies, voire des millénaires de crédulité dans tous les domaines qui pouvaient être approchés de manière scientifique.

Rappelons ici que ce fut à l´époque de Nicolas Poussin, qu´eut lieu la condamnation de Galilée.



La Mort de Socrate par Jacques-Louis David, en 1787.
Socrate, l'index pointé vers le ciel, comme Platon sur l'Ecole d'Athènes de Raphaël, en référence à sa doctrine idéaliste, dialogue avec ses disciples sur l'immortalité de l'âme

(dialogue du Phédon de Platon).
On aperçoit à gauche, drapé assis et immobile, tournant le dos à Socrate, Platon qui, d'après les textes, n'aurait pas assisté à sa mort.
Lui-même fit une liste pareille soulignant son absence par cette remarque : « Platon, je crois, était malade »
. 


LE PHILOSOPHE ROI

C’est par sa mort que Socrate influença le monde. Dans sa Lettre 7, Platon constate la mort injuste de Socrate et déclare que
« 
Donc le genre humain ne mettra pas fin à ses maux avant que la race de ceux qui, dans la rectitude et la vérité,
s'adonnent à la philosophie n'ait accédé à l'autorité politique ou que ceux qui sont au pouvoir dans les cités ne s'adonnent véritablement à la philosophie,

en vertu de quelque dispensation divine. »

ou dans son livre VII

« Puisque les philosophes ne peuvent devenir rois, il convient que les rois deviennent philosophes »

L'allégorie témoigne d'une exigence très forte en qualités humaines et intellectuelles, telle que rares étaient les prétendants à la direction des affaires de la cité qui pouvaient y satisfaire. Elle contribue ainsi à justifier dans La République un régime aristocratique par les gardiens-philosophes.

L'intervention du philosophe, praticien de la maïeutique ou dialectique, c´est à dire celui qui est capable de faire ressurgir des vies antérieures les connaissances oubliées, n'est pas sans risque lorsqu'il doit faire face à l'ensemble d'une cité, puisque la réaction des groupes dans ce domaine est d'être fermé aux idées démystificatrices et s'il parvenait à semer le trouble quant à la réalité, serait exposé au risque d'être tué.
 Telle est la position des prisonniers dans une caverne qui considèrent que celui d'entre eux qui reviendrait avec une meilleure connaissance du monde réel serait atteint de folie.

Le philosophe, selon Platon, doit devenir un législateur et un réformateur politique, afin d'obtenir l'instauration de la justice dans la cité.
C'est la nature et la place de ce type d'homme qui est souvent l'objet de ses réflexions.

Toutefois, selon certains dialogues comme la République, il faut le forcer à le devenir, car il est fort probable qu'il ne consente pas à « retourner dans la caverne». Mais, si ceci est réalisé à tour de rôle par tous les philosophes, et pour le bien de tous, il est fort probable qu'ils acceptent.

Ce philosophe Roi, figure opposée au sophiste, est représenté par le personnage de Socrate[], figure centrale des dialogues de Platon.

Ce premier était nommé par les comiques sous les appellatifs de "le gueux", "le mendiant", "le va-nu-pieds", etc.…

L´on comprend alors la représentation que fait POUSSIN de ses Rois Mages ou ROIS PHILOSOPHES
et pourquoi l´élection de bergers devant un tombeau plein de mystères.
Les bergers sont bien des gardiens de troupeaux et ils prennent bien soin d´eux.

Le philosophe doit être roi, affirme Platon. Car il est capable de faire les liens entre le ciel et la terre en lui. Alors il sera capable de tisser ces liens dans la société.

Par ailleurs, Platon lui-même condamne l'écrit (Phèdre, 276e ; République, 376d, 501e),
et il fait allusion à des
CONNAISSANCES SECRETES (lettre VII, 341 cd ; Phèdre, 274-278),
et à une connaissance plus fondamentale (République, 504c ; Timée, 48c), qui bien sûr n´est pas écrite, mais transmise oralement.



L'Ecole de Platon par Delville, 1898
Platon ressemble à Jésus prédiquant aux 12 apôtres, qui seront chargés à leur tour de transmettre l´enseignement.

ACADEMOS ET LES DIADOQUES

L´enseignement interdit est toujours transmis oralement et de façon cachée, secrète.
Impossible de l´impartir publiquement, comme le faisait Socrate,
mais en privé aux élus.

Ainsi l´enseignement secret passait aux héritiers appelés Diadoques . Mot provenant du grec ancien diádokhos qui veut dire « successeur ».

Le mot se décompose ainsi :  de  diá , « par » et  dékhomai « recevoir », c'est-à-dire littéralement, « celui par qui le sceptre est transmis »

 

C´est afin de le préserver des oreilles non adéquates que Platon fonda son école, éloignée du centre politique d´Athènes, appelée Académie.
En fait l'Académie était un bois sacré avec jardins et  portiques, aux abords d'Athènes, qui contenait le
TOMBEAU DU HEROS ACADEMOS.

C'est là que Platon  établit son académie.

Platon et Aristote ont enseigné dans cette école.

Sur le fronton de laquelle, on lisait le fameux : « Que nul n'entre ici s'il n'est géomètre »,

auquel fait allusion l´Apologie d´ Homère par Ingres qui contient le portrait de Nicolas Poussin.

Tableau qui nous a ouvert les yeux, permettant ainsi d´admirer les BERGERS D´ARCADIE sous un autre angle, plus géométrique…
  Pour Platon, la géométrie comme pensée pure, était l´ art qu'il fallait maîtriser pour être à ses yeux un philosophe complet.

L´artiste peintre manie la géométrie, mais peut-il être considéré comme philosophe ?


Poussin, Paysage avec Tombeau



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UNE CLEF BIEN OMBRAGEE
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DE L´ACADEMIE  ATHENES  à celle de FLORENCE ou  QUAND LES PEINTRES DEVIENNENT PHILOSOPHES