LES TROIS PILIERS D´ARCADIE




 


  

La Nature est un temple où de vivants piliers
Laissent parfois sortir de confuses paroles:
L'homme y passe à travers des forêts de symboles
Qui l'observent avec des regards familiers.
Charles Baudelaire. Les Fleurs du Mal

- VII - LES TROIS PILIERS D´ARCADIE : LA DAME DES BERGERS OU LA TRIADE FEMININE DE LA LUNE

LA DAME DES BERGERS OU LA TRIADE FEMININE DE LA LUNE



Nous avons déjà rencontré ce symbole à propos de Diane de Poitier, l´éternellement jeune  et de  Philibert De l´ORME, son surintendant des bâtiments royaux ( Voir )

Symbole de Robert Jordan, la RouX et l´infini

A la lune obscure fut associée Hécate, déesse des Morts, qui règne sur l’Hadès et guide dans l’initiation.  C´est bien devant un tombeau qu´on la retrouve chez Poussin du côté où le ciel est nuageux et grisâtre, opposé à celui du ciel où on devine le soleil qui s´y cache.

Ses attributs sont les poignards, les serpents et les clés de l’Hadès , le royaume des morts.
Grâce à ses trois têtes la déesse avait un champ de vision de 360° ( un CERCLE COMPLET ) et l'esprit malin ne pouvait lui échapper.

A l'origine, dans les langues indo-européennes, le mois et la Lune sont désignés par un même substantif masculin (mensis en latin, mênê en grec. . .). Mais l'astre passant pour avoir une influence néfaste, ce mot est jugé tabou et remplacé par un adjectif substantivé au féminin: Selênê en grec,  « LUEUR BRILLANTE », Luna en latin « LA LUMINEUSE », d'une racine indo-européenne dont proviennent également LUCIDE, LUIRE, LUMIERE....

Mensis, rattaché sans doute à la même racine que celle de metiri  « mesurer » : la Lune mesure le temps, se retrouve toutefois dans mois et mens­trues; les deux mots sont d'ailleurs liés puisque, comme en latin, mois au pluriel a désigné les menstrues . On disait avoir ses mois, XVIª s. . La vieille croyance, qui s´avère vraie,  selon laquelle le cycle menstruel serait lié à l'astre a donné à lune le sens de  « période des menstrues d'une femme » vers 1585.

La prétendue influence exercée par la Lune sur le psychisme humain est également à l'origine de certaines expressions  bien, ou  mal luné  et de quelques dérivés tel lunatique .

Introduite à Rome au VIe siècle av. J.-C., Diane reçut un culte sur l'Aventin en tant que déesse lunaire DISPENSANT LA LUMIERE NOCTURNE. Un siècle plus tard, elle sera assimilée à l'Artémis grecque.

Un jour de la semaine lui était voué: le lundi. Ce mot est issu du latin Lunae dies, littéralement  « jour de la Lune ». Aujourd'hui notre "Lundi".
Cet ordre est conservé dans l'italien lunedi , l'anglais a Monday, l'allemand Montag, de même structure ; l'ordre inverse, plus courant en latin, s'est maintenu en ancien français , deluns, en catalan, en occitan,  dilluns  tandis que lunis seul se retrouve en castillan lunes.

Pourtant nous avions dit que la Dame par ses couleurs était le soleil …. Ou plus exactement nous avons dit que cette Dame représente une source le LUMIERE qui est autre que celle de l´astre , puisque celui-ci est présent sur le tableau de Poussin, du côté opposé à cette femme. Elle guide l´INITIATION !

La triade féminine représente , le Ciel  par Sélène , la Terre par Artémis-Diane chasseresse et l´Inframonde par Hécate . Elle fait face à Jupiter-Zeus ou Ciel, Mars, Terre, et Quirinus, Enfers.

LA TRIADE CELTIQUE

Brigantia ,la jeune Déesse correspond à la Lune croissante : elle symbolise la naissance et l’expansion  c´est à dire la période de préparation.

Brigit  ou Brigantia est souvent comparée à la MINERVE- ATHENA  , avec qui elle partage un certain nombre de fonctions. Elle est la déesse-mère, elle règne sur les arts, la guerre, la magie et la médecine.

Elle est associée à la fête d’Imbolc, la purification du 1
er février, censée protéger les troupeaux et favoriser la fécondité. L’importance de son culte chez les Celtes a conduit les évangélisateurs chrétiens à lui substituer une sainte homonyme, sainte Brigitte.

En Gaule, son avatar Épona lui confère un rôle psychopompe évident .Un dieu psychopompe, littéralement en grec  le « guide des âmes ». Il  est le conducteur des âmes des morts, le guide dans la nuit de la mort.

Bélisama  la Déesse femme  correspond à la Pleine Lune : elle symbolise la maturité et l’épanouissement  ou période de développement « extérieur » de la personnalité et de l’individualité.

Belisama est une divinité importante du panthéon gaulois, dont le nom signifie « la très brillante ». Elle est à la fois la parèdre et l’équivalent féminin de Belenos.

Associée au feu domestique, elle a en charge la métallurgie, plus particulièrement la fabrication des armes,, c’est la déesse des forgerons dans son aspect guerrier ; elle est aussi responsable des arts. On la trouve dans une zone géographique très étendue, jusque dans les Pyrénées (Saint-Lizier).

Chez Poussin le pâtre en habit rouge est , comme nous avons vu, Mars.

On la compare à Minerve, à Athéna et à Brigit.

La Déesse vieille prend deux noms selon son aspect : si celui-ci est « clair », elle s´appelle 
Rosmerta ; s´il est  « sombre » alors nous avons à faire avec  Rigantona. Elle correspond à la Lune décroissante et à la Lune Noire. Elle symbolise l’enseignement ou la révélation de la sagesse acquise , période de développement « intérieur » et des réalités universelles.

Rosmerta est donc 'La Grande Dispensatrice' ou encore 'La Très Généreuse' ce qui s'accorde fort bien avec ses attributs. Tenant une corne d´abondance elle est souvent accompagnée de Mercure.
Alors que Rigantona, signifie « Grande Reine » 

Dans un conte celtique Rhiannon devient veuve du roi  Pwyll , son fils  Pryderi lui  succède, avec son épouse, Kigva. Rhiannon, quant à elle a épousé Manawyddan Fab Llyr, un prince ami de son fils. Au cours d’une promenade sur la colline de Narberth, un brouillard magique s’abat sur la région et la dévaste, ne laissant en vie que les deux couples. La misère les contraint à partir pour l’Angleterre, où ils vont exercer différents métiers, pour survivre.

De retour dans leur pays, poursuivant un SANGLIER BLANC, ils arrivent à un château inconnu où Pryderi et Rhiannon se retrouvent par un sortilège enchainés à une FONTAINE. Le château disparaît quand l’orage éclate.

Manawyddan et Kigva repartent une année puis reviennent s’installer pour cultiver la terre. À trois reprises, les récoltes sont dévorées par des souris géantes. Manawyddan capture la plus grosse et quand il va pour la pendre, UN MOINE, UN PRETRE PUIS UN EVEQUE ( soit BLANC, NOIR et ROUGE ) viennent lui proposer de racheter la vie de la souris. Manawyddan refuse et demande que cesse le sortilège. Le faux évêque, fiancé éconduit de Rhiannon, avoue être l’auteur de
cette machination et avoir agit par vengeance. Tout rentre dans l’ordre.

POUR QUE LA ROYAUTE SOIT RECONNUE, IL DOIT AVOIR UNE REINE QUI LEGITIME SON POUVOIR, car chez les Celtes, la Souveraineté est un concept féminin.
La pénitence qu’elle endure, suite à l’enlèvement de son fils, est un ajout dû à la christianisation du récit, cette notion étant inconnue de la civilisation celtique.

L’exercice de différents métiers est une illustration de la troisième classe fonctionnelle de la société, conforme à l’idéologie tripartite des Indo-européens

LA TRIADE PERSE EST MASCULINE

Baalshamin ou Bêl , Dieu phénicien des cieux chef des déités de la plupart des peuples sémitiques occupant l'est méditerranéen, et vénéré même en Égypte et à Rome
Il est le prince et maître de la terre, la pluie et la rosée, qui a combattu contre Mot, dieu de la mort, stérilité et sécheresse
 A sa droite le dieu-lune,  Aglibôl  et à gauche, le dieu-soleil,  Malakbêl ou Yarhibôl.

Donc Lune et Soleil font la paire !

Ces dieux masculins comme les triades féminines lunaires sont des motifs funéraires assez appréciés chez les différents peuples qui les adoraient.
Sélène, Diane ou Artémis et Endymion aussi ….
 

Séléné et Endymion sur le mont Latmon, sarcophage romain

ENDYMION,  LE BERGER IMMORTEL


 Jacques Leegenhoek ,  Diane et endymion


Poussin Sélène et Endymion

Chez les Romains, le mythe d'Artémis et Endymion se retrouve fréquemment sur des sarcophages de l'époque chrétienne et représente l'espoir d'une vie après la mort.
Mais alors que tous les peintres représentent Endymion endormi, au contraire, Poussin choisit en 1632 de représenter le jeune homme pleinement éveillé, à genoux devant la déesse, donc dans une pose stable de travail et en habits rouges (=2) alors que les couleurs de celle-ci donnent le numéro 13 ou XIII, la Mort !

Après la mythologie ancienne ce mythe d'Endymion connaît une grande fortune littéraire grâce à sa richesse symbolique, à l´époque de Nicolas Poussin , Michael Drayton écrit son Endimion and Phoebe (1595). Dans le poème, Endymion est un jeune berger qui s'est voué à Phœbé «  Brillante » ( alors que Phoebus ou Phébus est Apollon , le dieu solaire ). Celle-ci est également éprise de lui, et se présente comme une simple nymphe pour lui avouer ses sentiments.

Endymion la repousse, arguant de son engagement au service d'Artémis. Après qu'elle est partie, il regrette de l'avoir éconduite et s'endort au clair de lune en soupirant. Phœbé le visite pendant son sommeil ; à son réveil, il lui fait part de ses sentiments. C'est au tour de Phœbé de l'éconduire. Finalement, elle lui avoue sa véritable identité et annonce son intention de l'élever dans l'Olympe.

La fidélité au culte lunaire a donc sa récompense.

Dans la mythologie grecque, Phœbé est une Titanide, traditionnellement associée à la Lune, fille d’Ouranos (l e Ciel ) et de Gaïa ( la Terre ), épouse de son frère le Titan Coéos, ("CELUI QUI SAIT", "CELUI QUI PENSE" ,  parfois appelé Polos, qui signifie "LA VOUTE CELESTE". )  mère de Léto et Astéria

Asteria elle est la mère d'Hécate, qu'elle conçut avec Persès . Persès fils d'Hélios, le Soleil. Elle fut aimée de Zeus, qui la poursuivit. Pour lui échapper, elle se transforma en caille et plongea dans la mer. À l'endroit de sa chute apparut l'île d'Astérie qui sera plus tard nommée Délos. Dans l'Antiquité, elle s'appelle Lagia, ( l'« île aux
LIEVRES » ); Ortygie, ( l'« île aux cailles » ) ; Prypile, ( « PORTE DE FEU » ) ; Cynthère ; Pélasgie. Son nom à Délos ( « CLAIRE », « VISIBLE » ) s'explique par la mythologie.

Zeus immobilisa cette île qui était flottante pour que Léto, poursuivie sur terre et sur mer par la jalousie d' Héra, trouvât enfin un asile où elle pût mettre au monde ses jumeaux, Apollon et Artémis. L'île était sacrée : il n'était pas permis aux femmes d'y accoucher ; on ne pouvait non plus y enterrer les morts.

Baron Pierre Narcisse Guérin, Les Bergers au Tombeau d´Amyntas ( roi )
Un tombeau, une source présente et une femme qui montre le destin aux pâtres
Aux couleurs blanc et rouge soit 11, la FORCE !

 

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COMME LA CROIX QUI REGNE SUR LE CROMELECH DE BOUDET